Chez le fleuriste, au moment de choisir un bouquet, notre seul désir est celui de faire plaisir. Mais, n‘a-t-on jamais songé à la provenance de ces fleurs?
Les fleurs coupées ont, en réalité, une histoire qui doit interpeller notre conscience citoyenne.
« Lorsqu’un joli bouquet arrive chez vous, la probabilité est grande qu’il soit composé de roses kényanes. Elles auront voyagé environ 72h, et parcouru plus de 7.000 km »
Le constat est sans appel, puisqu’environ 85% des bouquets présents sur les étals européens sont cultivés en dehors de nos frontières et n’appartiennent à aucun label.
« Dans le détail, 87% de ces fleurs viennent directement des Pays-Bas et 6% de l’extérieur de l’UE. Et avant de transiter sur les Bourses néerlandaises, une bonne partie des tiges à boutons ont été cultivées au Kenya, en Ethiopie, en Equateur ou en Amérique du Sud. Les fleurs ont donc souvent fait un long voyage en avion puis en camions réfrigérés avant d’arriver dans nos vases« .
(Libération – Fleurs Coupées, la face sombre des bouquets – 14 fév.2018)
Des roses en toutes saisons
Pour satisfaire la demande occidentale, les producteurs adaptent leurs productions pour fournir l’Europe quelle que soit la saison. Ainsi, en toutes saisons, nous trouvons chez les fleuristes toutes sortes de fleurs.
La provenance des fleurs : un business mondialisé
Il y a 40 ans, ces fleurs étaient produites presque exclusivement aux Pays-Bas, plaque tournante de la vente internationale. Depuis quelques années, la grande distribution européenne se positionne comme intermédiaire et les Pays-Bas ont pu délocaliser leurs productions grâce à la levée de l’interdiction de ne commercialiser qu’aux Pays-Bas.
Dans les années 1980-90, des compagnies états-uniennes, britanniques, hollandaises et indiennes ont construit des fermes florales géantes au Kenya et en Ethiopie, pouvant employer jusqu’à 5000 personnes. Ces investisseurs étrangers ont profité d’un climat qui leur était favorable, notamment une main d’œuvre conséquente, peu couteuse et assez bien formée, ainsi que d’infrastructures de transport.
Une atteinte à l’environnement
Un bouquet de roses pour la Saint Valentin? Pour répondre à la demande des consommateurs d’avoir toutes sortes de fleurs en toutes saisons, les productions s’adaptent donc et y mettent les grands moyens:
- Irrigation de ces gigantesques exploitations : trouver de l’eau là où il n’y en a pas. Pour ce faire, détournement et assèchement de lacs, particulièrement celui de Naivasha au Kenya.
- Production à outrance : utilisation des pesticides et fongicides. Des méthodes ayant un impact sur la faune, la flore et les habitants.
Le coût climatique de ce marché est d’autant plus conséquent qu’après la récolte, vient l’heure d’un long voyage en avion ou en bateau à travers le monde.
Des conditions de travail pénibles
La majeure partie des employés des fermes horticoles étrangères sont des femmes qui travailleraient jusqu’à 60h/semaine, voire plus en période de fêtes européennes. Elles seraient payées très modiquement (de 28 à 94$/mois selon le pays) et leurs conditions de travail dangereuses puisqu’exposées à l’usage intensif d’engrais et de pesticides.
Lorsqu’un consommateur européen achète une rose produite à l’étranger à 1.5€, seulement 0.03€ arriveraient dans la poche de ceux qui l’ont cultivée, soit 2% du prix total de vente.
Le mouvement Slow Flower
Né au Royaume Uni, le mouvement Slow Flower s’est répandu dans de nombreux pays. Le principe est simple : des fleurs de saison en circuit court.
Les labels
Quelques producteurs responsables, environ 10%, se sont associés à des labels, tel que le celui de Max Havelaar, afin d’offrir un salaire et des conditions de travail décents à leurs ouvriers.
En France, plusieurs labels ont vu le jour, dont Fleurs de France, Plante Bleue, Charte Qualité Fleurs, etc. mais également un collectif nommé Fleurs Françaises (inspiré du mouvement anglo-saxon Slow Flower).
Et, pour faire simple, en rejoignant une AMAP ou en allant à la rencontre des producteurs locaux, vous trouverez toujours de quoi (vous) faire plaisir et faire du bien à la planète;)
En l’absence de labels, il est aujourd’hui impossible pour le consommateur de connaître la provenance et les conditions de production de ces fleurs coupées.
Alors, vous réfléchirez bien à 2 fois avant d’acheter vos fleurs la prochaine fois? Pour vous y aider, voici quelques producteurs de fleurs locaux respectueux des saisons :
Pour rester informé et aller plus loin:
Sources :
- « Roses d’Afrique, roses du monde » Géoconfluences, 29.09.17
- « Mais d’où viennent donc nos fleurs ? » Ivan du Roy, 27.02.14
- « Nos roses de la St Valentin assèchent un lac au Kenya » LeMonde, A.Garric, 14.02.11
- Le marché mondial des fleurs et son impact écologiques – Brut. 2018